Genèse des mots : le mot se créé
Au début était le début. Il n'était rien, que lui-même.
Mais il fallut qu'il fût. Il fut. Puis il se métamorphosa, et il fut quelque
chose. Alors, on l'appela, et il s'appela : Cela. C'est comme Cela que tout fut
créé.
Il était deux, l'un dans l'autre. Il fut créé par
lui-même, de lui-même, pour lui-même. D'une seule volonté, pour le bien commun.
Il fut admiré pour son nom et sa présence dans le monde. L'orgueil le prit, et
il oublia sa naissance. L'Ego apparut, et chassa l'Autre dans l'obscurité sans
fond. Quand l'Ego fermait les yeux, il croyait être seul. Il ignorait Celui qui
l'observait de toute éternité. Il fut rappelé à l'ordre, et il eut honte de son
égarement. Il voulut prier pour se faire pardonner, mais il ne savait pas
comment faire. On lui indiqua le ciel, et le haut fut en haut, et le bas fut en
bas. Ceci est une métamorphose. Il pria.
On n'entendait rien, que le bruissement des vents qui
agitaient la surface des eaux. Des vagues se formèrent, et firent le mouvement
dans les eaux. La terre s'échauffa et, fécondée par les eaux, donna naissance à
nombre de vivants. Les vivants peuplèrent la terre, pour recouvrir d'amour le
corps de leur reine. La terre fut reconnaissante, et en échange de cet amour
elle les accueillit en son sein, leur prodiguant du confort et pourvoyant à
leurs besoins. Le miel et le lait coulaient à flot, l'orge et le blé poussaient
avec abondance. La terre était un grand jardin d'or et d'argent, où la nuit
n'excédait pas le jour, et où le jour n'excédait pas la nuit. En équilibre,
elle tournait sur elle-même et autour d'Enlil qui dispensait généreusement ses
rayons de lumière à tous, sans distinction.
Alors arriva l'homme, dans le rêve d'Enlil. L'homme
était encore neuf, il n'avait pas de nom et il voyait le monde dans toute sa
profondeur. Puis le temps commença à avancer, pour lui faire connaître la
souffrance. L'homme découvrit sa mémoire, et lutta contre le temps pour
conserver ses souvenirs. Gardien du secret du mot vivant, il voulut le transmettre.
Pour cela, il inventa le langage. Cette invention se diffusa sur la planète, et
parvint aux portes du royaume divin. C'est ainsi que la langue fut créée, et
c'est la richesse la mieux partagée entre les hommes. Puis le désordre revint
et mit un terme à la belle entente qui régnait entre les hommes et les bêtes.
Les mots perdirent leur pouvoir, les lettres se mélangèrent, et de nombreuses
choses perdirent leur nom. Ceux qui savent s'éclairer dans le silence
retrouveront la voie cachée. Au sommet de la montagne inversée la chose sans
nom les sauvera pour l'éternité, à moins qu'elle ne les perde pour l'éternité.
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